Le Bleu d’Auvergne est un fromage à pâte persillée au lait de vache produit en Auvergne, dans le Massif central, dans le sud-est de la France. Le Bleu d’Auvergne est protégé depuis 1975 en France par une AOC (Appellation d’Origine Contrôlée) et depuis 1996 dans toute l’Union Européenne par une AOP (Appellation d’Origine Protégée).
Histoire
En Auvergne, la fromagerie est une tradition de longue date. Dès le début du Moyen Âge, on fabriquait déjà des fromages bleus dans la région. La première représentation picturale de la Fourme d’Ambert, un fromage à pâte persillée également originaire d’Auvergne, date du VIIIe siècle après J.-C. La date à laquelle le premier Bleu d’Auvergne a été fabriqué ne peut cependant plus être déterminée précisément aujourd’hui. Les premiers fromages de la région étaient toutefois colonisés par des spores de moisissure bleue en suspension dans l’air. Le résultat n’était pas toujours très attrayant sur le plan esthétique ; la régularité des veines de moisissure et la qualité du fromage laissaient souvent à désirer.
L’invention du Bleu d’Auvergne, tel qu’on le connaît aujourd’hui, remonte au milieu du XIXe siècle. En 1855, le jeune fromager Antoine Roussel tenta de provoquer délibérément la formation de moisissure bleue dans le fromage. Après de nombreux essais infructueux, il constata la présence de la même moisissure sur un morceau de pain de seigle. Il fit sécher le pain et le réduisit en une fine poudre qu’il ajouta au caillé. Pendant la phase d’affinage, il piqua à plusieurs reprises des aiguilles à tricoter dans les meules, à intervalles réguliers, afin d’oxygéner la moisissure. Les moisissures bleues se développèrent alors dans les orifices des aiguilles, permettant ainsi d’obtenir un persillage homogène et une qualité inégalée : le Bleu d’Auvergne était né ! Depuis lors et jusqu’à aujourd’hui, la méthode de fabrication n’a pas beaucoup changé, si ce n’est que le piquage des canaux d’air se fait aujourd’hui mécaniquement.
La fabrication du Bleu d’Auvergne, de calibre moyen, était un bon moyen pour les agriculteurs de conserver leur lait. En particulier, les petits paysans dont le troupeau ne donnait pas assez de lait pour fabriquer une énorme fourme de Cantal, pouvant peser jusqu’à 45 kg, pouvaient fabriquer du Bleu d’Auvergne pour le consommer eux-mêmes ou le vendre sur les marchés.
Selon la réglementation européenne, le Bleu d’Auvergne ne peut être fabriqué que dans 630 communes au total des départements du Cantal, du Puy-de-Dôme, de la Haute-Loire, de l’Aveyron, de la Corrèze, du Lot et de la Lozère, dans la partie nord et centrale du Massif central. La zone de production doit se situer systématiquement à plus de 500 mètres au-dessus du niveau de la mer et atteint parfois des altitudes de plus de 1 000 mètres. Le lait doit provenir des races bovines Abondance, Aubrac, Brune, Ferrandaise, Simmental Française et Tarentaise. Ce n’est que dans des cas exceptionnels et justifiés que le conseil régulateur peut autoriser l’ajout temporaire de lait d’autres races. Les bêtes doivent être nées et élevées dans la région et doivent séjourner au moins 150 jours par an en pâturages. Il faut environ 20 à 25 litres de lait pour obtenir une meule de Bleu d’Auvergne. Au total, environ 3 300 producteurs laitiers fournissent le lait destiné à la production du Bleu d’Auvergne. Le lait est transformé en fromage par 9 laiteries.
Fabrication
Pour la fabrication traditionnelle du Bleu d’Auvergne, le lait pasteurisé, thermisé ou non traité est d’abord fermenté pendant au moins 4 heures à une température comprise entre 6 et 14 °C. Des bactéries lactiques peuvent y être ajoutées pendant cette période. La phase de fermentation est une tradition qui favorise une légère acidification du lait. Après la phase de fermentation, le lait est chauffé à une température comprise entre 30 et 34 °C, puis on y ajoute des cultures de moisissure bleue (Penicillium roqueforti). Le lait est alors emprésuré.
Le caillé est ensuite découpé en morceaux de la taille d’un grain de maïs ou d’une noisette à l’aide d’un tranche-caillé, puis remué afin que les grains de caillé puissent se solidifier et former une membrane. Cette membrane est ensuite importante pour que des cavités puissent se former dans le fromage, dans lesquelles la moisissure bleue pourra se développer. Puis, on retire une grande partie du petit-lait du caillé en le laissant s’écouler. Le caillé est alors placé dans des moules cylindriques, d’où le petit-lait restant peut s’égoutter. Ce processus d’égouttage dure au maximum 72 heures. Le fromage n’est pas pressé pendant cette étape. Ainsi, les cavités du fromage sont préservées.
Après l’égouttage, le Bleu d’Auvergne est salé deux fois à la main avec du gros sel marin. Lors du premier salage, la face supérieure et le pourtour sont salés, lors du second, la face inférieure et à nouveau le pourtour. Le salage à sec à la main est important pour la formation ultérieure de la croûte, typique du Bleu d’Auvergne. Avant de saler le fromage à la main, on peut éventuellement le plonger dans un bain de sel.
Dix jours maximum après l’emprésurage, les meules sont percées à plusieurs reprises à l’aide de longues aiguilles en inox afin d’oxygéner les moisissures bleues. Les moisissures bleues se développent alors de préférence le long de ces perforations. Après le piquage, le Bleu d’Auvergne est affiné pendant au moins 15 jours à une température de 6 à 12 °C et à un taux d’humidité relative supérieur à 90 %. Cette phase est éventuellement suivie d’une période de stockage à une température de 0 à 6 °C, si la durée minimale d’affinage de 28 jours au total n’est pas encore atteinte après l’emprésurage.
Aspect et goût
Le Bleu d’Auvergne se présente sous la forme d’un cylindre plat d’un diamètre de 19 à 23 cm, d’une épaisseur de 8 à 11 cm et d’un poids de 2 à 3 kg. Autrefois, il existait de plus petits formats d’un poids de 1 kg, 500 g ou 350 g. Ceux-ci ne sont toutefois plus fabriqués depuis des années. Le fromage peut cependant être vendu en portions de différentes tailles.
La croûte du Bleu d’Auvergne est sèche, ne présente pas de zones humides et ne transpire pas. Elle n’a pas une couleur uniforme et peut présenter des veines de moisissure blanches, grises, vertes, bleues et noires. La pâte est de couleur blanche à crème. Elle est trouée et régulièrement parcourue de veines de moisissure de couleur bleu-vert. Les veines de moisissure ont la taille de grains de blé ou de maïs. La consistance du fromage est fondante, crémeuse et onctueuse.
Le Bleu d’Auvergne a un goût prononcé, équilibré en bouche et une saveur typique de moisissure bleue, de sous-bois et de champignons. Il peut être légèrement salé et présenter une subtile amertume. Selon son degré de maturité, il a un goût plus ou moins affirmé résultant des arômes produits par la formation de la moisissure Penicillium roqueforti.
Utilisations culinaires
Le Bleu d’Auvergne convient bien comme fromage de table ou comme en-cas. En raison de son goût plutôt modéré, il se prête également bien aux vinaigrettes ou aux sauces pour pâtes.
Pour accompagner le Bleu d’Auvergne, des vins blancs comme un Monbazillac ou un Pineau des Charentes sont préconisés. Un rosé peut également faire l’affaire, comme un Cabernet d’Anjou demi-sec ou un Corent, un vin d’Auvergne plutôt méconnu. Quant aux vins rouges, il est recommandé d’opter pour des vins avec une sucrosité résiduelle, comme un Maury ou un Rasteau doux. D’autres boissons alcoolisées, comme un Poiré ou un Pommeau de Normandie, se marient également très bien avec le Bleu d’Auvergne.