Qu’est-ce que le Comté ?

Qu'est-ce que le Comté ?

Le Comté est un fromage à pâte dure au lait cru de vache, originaire de la région française de Franche-Comté, dans le massif du Jura, à la frontière avec la Suisse. Il est très populaire en France et porte le surnom de « roi des fromages ». Le Comté est protégé en France depuis 1952 par une AOC (Appellation d’Origine Contrôlée) et dans toute l’Union Européenne depuis 1996 par une AOP (Appellation d’Origine Protégée). Avec environ 45 000 tonnes par an, il affiche la plus grosse production de tous les fromages AOC en France.

Histoire

L’art de la fromagerie est maîtrisé dans cette région de l’est de la France depuis l’Antiquité. Pline l’Ancien, un écrivain et naturaliste romain du Iᵉʳ siècle, en parlait déjà. Des auteurs du XVe siècle et Victor Hugo au XIXe siècle ont également mentionné les grandes meules de fromage fabriquées sur ces terres. Le Comté tel qu’on le connaît aujourd’hui dérive du Gruyère, dont la recette a été importée dans la région au début du XVIIIe siècle par des fromagers de la région de la Gruyère, en Suisse. Jusqu’à récemment, le Comté portait ainsi le nom de « Gruyère de Comté ».

La production du Comté sous forme de grosses meules, toujours en usage aujourd’hui, remonte au Moyen Âge. À cette époque, les paysans de la région se sont rendu compte qu’il n’était ni économique ni pratique pour eux que chacun transforme le lait de ses quelques vaches en fromage. Pour cette raison, plusieurs fermiers des environs d’un village se sont regroupés au sein d’une coopérative à laquelle chacun apportait le lait de ses vaches. Ces coopératives produisaient alors chaque jour une seule grande meule de fromage à partir du lait des vaches de différents troupeaux. Ces petites laiteries de montagne étaient et sont toujours appelées « fruitières ». Ces fruitières existent aussi bien dans le Jura que dans les Alpes, du côté français comme du côté suisse. Elles étaient exploitées soit dans la ferme d’un des membres de la coopérative, soit dans un bâtiment indépendant dans le village.

Dans les fruitières, un fromager à plein temps transformait le lait en fromage. Une fois les meules affinées, elles étaient partagées entre les fermiers de la coopérative. Ce fromager, appelé maître fruitier, recevait soit un salaire fixe, soit une partie de la production de fromage en guise de salaire. Ce mode de répartition des fromages au sein des coopératives est attesté depuis le XIIIe siècle. La plus ancienne de ces fruitières se trouve dans le village de Déservillers, dans le Doubs. Elle a été fondée en 1273. Le fromage au lait de vache obtenu de cette manière était appelé « Vachelin ». Cela permettait de le distinguer du fromage au lait de chèvre, appelé « Chevrolet ».

Cette idée de coopérative laitière a perduré jusqu’à aujourd’hui. En témoigne le fait que de nos jours, aucun Comté n’est fabriqué selon la méthode « Fermier », qui stipule que le fromager ne peut transformer que du lait provenant de sa propre ferme. Comme il y a 800 ans, la majorité des meules de Comté proviennent de coopératives.

Vers la fin du XVIe siècle, les meules de fromage qui n’étaient pas consommées par les fermiers eux-mêmes étaient vendues. Une grande partie de la production était transportée au marché de Lyon pour y être écoulée.

Pendant la Guerre de Dix Ans, un conflit survenu dans la région pendant la Guerre de Trente Ans entre 1634 et 1644, de nombreux villages de Franche-Comté ont été détruits et la région a été dévastée. Une grande partie de la population a fui la guerre et une épidémie de peste pour se réfugier en Suisse de sorte que de nombreuses campagnes ont été dépeuplées. La production de fromage fut pratiquement stoppée.

À partir de 1678, de nombreuses familles expulsées de Suisse revinrent sur leurs terres. Elles importèrent de Suisse une nouvelle approche en matière d’épaississement du lait. Alors qu’auparavant, le lait était surtout épaissi avec des substances végétales, comme par exemple du Gaillet jaune (Galium verum), il était désormais épaissi avec de la présure de veau, comme c’était l’usage en Suisse. Cette technique permit d’augmenter à la fois le rendement et la qualité du fromage.

Au XVIIIe siècle, la demande en Comté connut un essor considérable. Le nombre de fruitières augmenta donc également. Les producteurs laitiers des régions moins montagneuses de Franche-Comté se regroupèrent alors eux aussi en coopératives. Au total, plus de 700 coopératives furent recensées à cette époque. Avec l’arrivée du chemin de fer, il était désormais possible de transporter le Comté rapidement et sur de longues distances. De nouveaux marchés ont ainsi pu être conquis en France et à l’étranger. En raison de la demande croissante, le nombre de fruitières a également continué à augmenter. Vers la fin du XIXe siècle, la région comptait environ 1 800 laiteries.

Au début du XXe siècle, les méthodes de production se sont modernisées et partiellement automatisées. Certaines petites laiteries se sont regroupées pour former des entreprises plus importantes, si bien qu’au début de la Première Guerre mondiale, en 1914, il ne restait plus que 500 fruitières. La guerre a ensuite marqué un nouveau tournant. Les hommes qui produisaient le lait et le transformaient en fromage furent appelés sous les drapeaux. Pour les remplacer, on fit appel à des hommes venus de Suisse, pays neutre, qui n’étaient pas appelés au front.

Aujourd’hui, le Comté est l’un des fromages les plus réputés et les plus consommés en France. Il ne peut être fabriqué que dans le massif du Jura, dans les communes des départements du Doubs, du Jura et de la Haute-Saône, ainsi que certaines communes des départements de l’Ain, du Territoire de Belfort, de la Côte-d’Or, de la Haute-Marne, de la Saône-et-Loire et des Vosges.

Seul le lait de vaches des races Montbéliarde et Simmental est utilisé. La proportion de vaches montbéliardes dans les troupeaux est de 95 %. La Montbéliarde est réputée comme la race tachetée la plus productive au monde. La proportion entre protéines et matières grasses dans son lait est considérée comme optimale pour la fabrication de fromage. Les vaches doivent être nourries exclusivement de graminées et d’herbes des pâturages et, en hiver, de foin des prairies jurassiennes. Les fourrages ensilés sont interdits.

Le lait destiné à la production du Comté est fourni par quelque 3 200 producteurs laitiers, soit environ 150 000 vaches. Les producteurs sont généralement regroupés en petites coopératives communales, qui possèdent chacune leur propre fromagerie et emploient un maître fromager attitré pour produire le Comté. Au total, l’aire de production autorisée compte 138 petites laiteries qui collectent leur lait dans un rayon de 25 km maximum. En outre, la région compte également 37 grandes laiteries. Le fromage est affiné par 188 affineurs professionnels. Au total, environ 45 000 tonnes de Comté sont produites chaque année. Cela correspond à environ 1,6 million de meules. Pour obtenir une meule de Comté d’environ 40 kg, il faut 400 litres de lait, ce qui correspond environ à la production journalière de 20 vaches.

Fabrication

Pour fabriquer le Comté, le lait de vache non pasteurisé est d’abord chauffé lentement à 33 °C dans des cuves en cuivre, les « chaudières », avant d’être emprésuré. Après coagulation, le caillé est découpé en morceaux de la taille d’un grain de riz à l’aide d’un tranche-caillé, puis chauffé à une température de 53 °C pendant au moins 30 minutes, ce qui permet au petit-lait de se séparer du caillé.

Le caillé est ensuite transféré dans des moules et pressé pendant 24 heures. Les meules sont alors retournées à intervalles réguliers. Elles sont ensuite salées à sec ou mises en saumure. Les meules sont alors envoyées dans une cave de pré-affinage pour un stockage intermédiaire. Après quoi, les meules sont transférées dans de grandes caves d’affinage fraîches de la région où elles sont affinées sur des planches en bois de chêne pendant au moins 4 mois, souvent 6 à 12 mois. La durée moyenne d’affinage est de 8 mois. Pendant cette période, les meules sont régulièrement retournées et frottées avec du sel.

Après la phase d’affinage, chaque meule est évaluée par un comité d’experts qui attribue un maximum de 20 points selon des critères de qualité prédéfinis. Les meules de Comté ayant obtenu plus de 15 points se voient apposer une étiquette verte portant la mention Comté Extra. Celles qui obtiennent entre 12 et 15 points reçoivent une étiquette brune. Les meules ayant récolté moins de 12 points ne peuvent pas être vendues sous l’appellation Comté.

Aspect et goût

Le Comté se présente sous la forme d’une grande meule ronde à base plate ou légèrement convexe, d’un diamètre de 50 à 70 cm, d’une hauteur de 8 à 13 cm et d’un poids de 40 à 50 kg. Sa teneur en matière grasse est d’au moins 45 %.

Le goût du Comté diffère selon la saison à laquelle il est produit en raison des variations du régime alimentaire des vaches :

  • Dès la fin du mois de mars, les vaches quittent les étables pour se rendre dans les pâturages où elles se nourrissent de jeunes herbes fraîches et de plantes aromatiques. Le Comté de printemps a donc un goût doux et fruité.
  • En été, le régime alimentaire des vaches se compose de graminées, d’herbes de pâturage vigoureuses et de fleurs. Le Comté d’été est corsé et contrasté.
  • En automne, le régime alimentaire des vaches passe progressivement de la pleine floraison à la plante desséchée. Le Comté d’automne acquiert ainsi des saveurs fruitées et matures, aux accents de noix et aux notes légèrement terreuses.
  • En hiver, les vaches sont nourries avec le foin des prairies du massif jurassien. Le Comté d’hiver devient ainsi corsé et savoureux.

Utilisations culinaires

Les vins blancs secs du Jura ou d’Alsace se marient bien avec le Comté. Les vins rouges légers, comme un Cabernet Sauvignon moelleux et mature, conviennent également très bien.

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