Qu’est-ce que le Salers ?

Qu'est-ce que le Salers ?

Le Salers, parfois appelé Tomme de Salers, est un fromage à pâte pressée au lait cru de vache originaire d’Auvergne, en France. Il est protégé en France depuis 1961 par une AOC (Appellation d’Origine Contrôlée) et dans toute l’Union Européenne depuis 1996 par une AOP (Appellation d’Origine Protégée). Le cahier des charges du Salers est l’un des plus stricts de tous les fromages AOP français. Il est le seul fromage AOP français à être fabriqué exclusivement à la main, selon la méthode fermière, dans des fermes.

Le fromage a pris le nom du petit village de Salers dans le département du Cantal, dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, en France. Ce petit village médiéval est l’un des plus beaux de France. La petite commune a également donné son nom aux vaches Salers. La Salers est une race bovine domestique très primitive à la robe brun-rouge et aux cornes en forme de lyre. Elle est particulièrement bien adaptée aux conditions climatiques de la région.

Histoire

Le Salers compte parmi les plus anciens fromages de France et trouve ses racines au temps des Gaulois. Pline l’Ancien, un écrivain et naturaliste romain du Iᵉʳ siècle, mentionnait déjà le fromage d’Auvergne il y a près de 2 000 ans. Dans le livre 9 de son « Histoire naturelle », il rapporte que le fromage le plus apprécié à Rome est celui du « pays de Gabalès et du Gévaudan ».

Autrefois, les bovins étaient conduits en altitude pendant les mois d’été pour paître dans les juteux pâturages d’été. Le lait des vaches était transformé en fromage qui, après avoir été stocké quelque temps dans les alpages, était redescendu dans la vallée. L’élevage des bovins, la traite et la fabrication du fromage étaient généralement l’affaire de trois hommes, dont la répartition des tâches était strictement définie. Le berger (vacher) s’occupait des bovins, les menait au pâturage et veillait à ce qu’ils reçoivent toujours la meilleure nourriture ; son assistant (boutillier) l’aidait dans ses tâches et trayait les bêtes matin et soir ; enfin, le fromager (buronnier) se chargeait de la fromagerie et transformait le lait en fromage. Les vachers, les boutilliers et les buronniers cohabitaient tout l’été dans une cabane en pierre rudimentaire (buron). Celle-ci servait à la fois de dortoir, de cuisine, de fromagerie et d’entrepôt d’affinage.

Aujourd’hui, seuls six producteurs fabriquent encore le Salers de cette manière très traditionnelle dans les alpages. Leurs fromages portent la mention spéciale « Salers Tradition », sur laquelle est représentée la tête d’une vache. Ces fromages représentent la variété de Salers la plus authentique et la plus traditionnelle.

Autrefois, le Salers n’était fabriqué qu’entre le 20 mai et le 30 septembre, période pendant laquelle les vaches se trouvaient dans les pâturages d’été et se nourrissaient exclusivement d’herbe et de plantes sauvages. Cette flore particulière du sol volcanique du Cantal a une influence décisive sur le goût du lait. Au fil du temps, la période de fabrication a été étendue à une période comprise entre le 15 avril et le 15 novembre. Pendant cette période, les vaches ne passent pas tout leur temps sur les alpages de montagne, mais elles doivent rester dehors en permanence et se nourrir de fourrage vert dans les pâturages. Le reste de l’année, on fabrique un fromage très similaire, appelé Cantal. Les vaches qui donnent le lait destiné à la fabrication du Cantal sont nourries au foin.

Selon le règlement de l’AOP, le Salers ne peut être produit que dans le département français du Cantal (137 communes) et dans plusieurs communes des départements voisins du Puy-de-Dôme (24 communes), de l’Aveyron (5 communes) et de la Corrèze (1 commune).

Aujourd’hui, 95 producteurs fabriquent toujours du Salers. Parmi eux, seuls une dizaine ont encore un troupeau exclusivement composé de vaches Salers, dont 6 produisent encore de manière traditionnelle en burons. Au total, on dénombre environ 4 500 vaches laitières, qui produisent environ 15 000 000 de litres de lait par an. Pour obtenir une meule de Salers d’environ 40 kg, il faut environ 400 litres de lait. La production annuelle de Salers est d’environ 1 500 tonnes. Cela fait du Salers un fromage relativement rare, ce qui se répercute en conséquence sur le prix. Rares sont les fermiers qui affinent encore eux-mêmes leur fromage. Seuls 24 affinent encore entièrement leur fromage et 8 affinent encore une partie de leur production. Le reste des producteurs vendent leurs meules « crues » à l’un des 11 affineurs professionnels de la filière.

Autrefois, le lait utilisé pour la fabrication du Salers provenait exclusivement de vaches de race Salers. Ces bêtes produisent peu de lait, mais celui-ci est très riche en matières grasses et en arômes. Il n’existe cependant pas d’obligation de fabriquer le fromage exclusivement avec du lait de vache Salers. C’est pourquoi les fromagers utilisent désormais en partie du lait d’autres races bovines comme la Holstein, la Montbéliarde, l’Abondance ou la Simmental, dont le rendement laitier est bien plus élevé. Néanmoins, la hausse de la demande de fromage produit à partir du lait de vaches Salers et les prix plus élevés qui peuvent en être tirés ont largement contribué à la préservation de cette ancienne race bovine menacée d’extinction.

Les vaches Salers ont la particularité rare et exceptionnelle de ne produire du lait que lorsqu’elles reconnaissent leur propre veau. Pendant la traite, le veau doit donc être en vue de sa mère. Si le veau meurt, sa mère ne donne plus de lait. Les producteurs laitiers ont alors recours à une astuce très ancienne, transmise de génération en génération : ils dépouillent le veau décédé de sa peau et s’en servent pour couvrir un autre veau. Ainsi, la mère se laisse tromper et continue à produire du lait. Une vache Salers produit environ 7 à 9 litres de lait par jour.

Fabrication

La fabrication du Salers n’est pas très différente de celle du Cantal. Le lait de vache utilisé pour la fabrication du Salers ne subit aucun traitement. Il ne doit être ni pasteurisé, ni réfrigéré, mais transformé directement après la traite, donc encore chaud. Les fromagers font du fromage deux fois par jour : le matin avec le lait du matin et le soir avec le lait du soir.

Le lait non traité, encore chaud, est chauffé à une température de 30 à 34 °C, puis emprésuré pendant plus d’une heure. La cuve traditionnelle en bois de châtaignier, la « gerle », dans laquelle le lait est mis à cailler, donne au caillé un arôme particulier. En outre, l’ajout de ferments lactiques supplémentaires est ainsi superflu. Le caillé est ensuite réduit à la taille d’une noisette. Le petit-lait est égoutté et le caillé est pressé une première fois. On laisse ensuite reposer et mûrir la pâte pressée pendant quelques heures. Pendant ce temps, les ferments lactiques naturels acidifient la pâte.

Ensuite, on broie à nouveau le fromage dans la « milleuse » et on sale le caillé en plusieurs étapes avec environ 30 à 35 g de sel par kilogramme de fromage. On laisse ensuite reposer le caillé salé pendant au moins 3 heures. Puis, on le verse dans des moules ronds recouverts d’une fine toile de lin. Ces moules sont pourvus de renfoncements en haut et en bas, qui se traduisent par des rainures sur le pourtour de la meule de fromage.

Avant le pressage, on appose en outre sur la meule une marque rouge caractéristique qui identifie le fromage comme un véritable Salers AOP. Outre les lettres SA pour Salers, la griffe contient le numéro d’identification du fermier producteur et la date de fabrication. Qui plus est, les mots « Salers Salers » sont gravés au moyen d’un pochoir sur la face supérieure du fromage lors du pressage. Si le cheptel est composé uniquement de vaches de race Salers, les mots « Salers Tradition » sont apposés en relief. La tête d’une vache Salers est ensuite gravée sur les flancs. Le fromage est alors pressé dans les moules pendant 48 heures. Pendant cette période, les meules sont démoulées et retournées à plusieurs reprises.

Le Salers est ensuite affiné à des températures de 6 à 12 °C et à un taux d’humidité relative souvent supérieur à 95 % pendant au moins 3 mois. La durée d’affinage peut toutefois aller jusqu’à 18 mois, voire plus. Pendant cette période, les meules sont régulièrement retournées et frottées avec un chiffon. Le caractère du Salers s’accentue encore grâce à ces conditions d’affinage spécifiques. La fabrication du Salers ne peut d’ailleurs se faire que de manière exclusivement artisanale, dans les fermes et les alpages de la région.

Aspect et goût

Le Salers se présente sous la forme d’une meule cylindrique de 36 à 42 cm de diamètre, pesant entre 35 et 45 kg. La croûte est épaisse et dorée, avec des marbrures rouge orangé. La pâte est ferme et souple. Le goût est aromatique, fruité, légèrement acidulé, âpre, avec des arômes spécifiques à chaque terroir.

En raison du mode de fabrication particulier, qui consiste à broyer puis à presser à nouveau la pâte, la croûte est rarement complètement hermétique, mais présente fréquemment de petites fissures. Ces fissures permettent à la moisissure de pénétrer à l’intérieur du fromage pendant la phase d’affinage. Il arrive ainsi que des veines de moisissure apparaissent dans le fromage de long en large. Ces veines de moisissure ne sont toutefois pas un défaut, mais au contraire un signe de qualité.

Utilisations culinaires

Le Salers se marie particulièrement bien avec des vins rouges légers comme un Côtes-d’Auvergne, un Sancerre Rouge ou un Saumur-Champigny.

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